Paniers alimentaires du ramadan: Quand les valeurs d’humanisme font aussi l’actualité

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Moustoifa Hamada lors de la distribution des paniers alimentaires à Sada, ce samedi 5 juillet 2014
Chaque année, Moustoifa Hamada de Narivane participe à la distribution des paniers alimentaires à Sada (Archives)

Le dispositif de Narivane est bien rodé. Depuis 5 ans, pendant le mois sacré musulman, avec sérieux et constance, l’association de Sada permet aux plus démunis de bénéficier de paniers, des petits colis qui permettent à ces personnes souvent très démunies de manger, tout simplement.

A cinq reprises, chaque semaine pendant le mois du jeûne, les bénéficiaires y trouvent huit produits: 1kg de farine, 1kg de sucre, 1 litre de lait, 5kg de riz, une conserve de légumes, 1 litre d’huile. Et le vermicelle et les sardines sont remplacés pour le 5e panier, celui de l’Aïd, par des œufs, une bouteille de sirop de fruit et un poulet.

Mais cette année, quelque chose a changé car l’actualité mahoraise de ces dernières semaines est passée par là. Impossible pour l’association de faire abstraction de la crise des «décasages» et des tensions. « Bien sûr, nous en avons discuté entre nous. Mais ce qui nous guide, c’est à la fois des principes religieux et des convictions humanistes. Il n’était pas question de changer quoi que ce soit», affirme Moustoifa Ahamada de Narivane.

Sur place, l’association s’est simplement fait plus discrète que les années précédentes, pour ne heurter personne et poursuivre son action. Mais, paradoxalement, l’écho de la crise sociétale que connaît Mayotte a servi la cause de l’association.

La solidarité face à l’actualité

Les médias réunionnais et métropolitains ont raconté les expulsions et les bangas brûlés, de quoi choquer les opinions publiques dans leur ensemble et particulièrement les fidèles musulmans. Résultat, pour la première fois, Narivane qui récolte des dons à Mayotte et depuis l’an dernier à La réunion, a bénéficié d’un élan de solidarité depuis la métropole. Les dons en provenance de l’hexagone représentent cette année 26% des sommes reçues, ceux de La Réunion 20%.

Les produits que l'on retrouve dans le panier repas 2016 de Narivane
Les produits que l’on retrouve dans le panier repas 2016 de Narivane

L’association a ainsi pu servir bien plus de personnes que les années précédentes. Jusqu’à présent, il était toujours très difficile pour les bénévoles de refouler des gens dans le besoin, faute de moyens. Seuls les premiers arrivés étaient servis.

«Pour la 1ère fois, le samedi 25 juin, on a pu donner à tout le monde. Lorsqu’on a donné les tickets pour organiser la distribution, tous ceux qui en ont voulu en ont eu un», explique Moustoifa Ahamada.

Une distribution record

Ce jour-là, ce sont 400 colis qui auront été distribués pour autant de familles, de quoi assurer 10.000 repas! Un record. Au total, les colis du mois de ramadan auront permis 35.000 repas.

«Bien sûr, c’est très bien, mais on n’oublie pas que ceux qui attendent souvent longtemps pour avoir les colis ne représentent qu’une goutte d’eau dans la misère à Mayotte. On connaît le pourcentage de la population qui vit sous le seuil de pauvreté…» relativise, tout en sagesse, Moutoifa Ahamada. Ce pourcentage est en effet de 84%.

Changer la vie

Ces cinq distributions dans les locaux de l’association se doublent, comme les années précédentes, de livraisons à domicile, principalement chez des anciens qui ne peuvent pas se déplacer, mais aussi dans des familles qui ne veulent pas exposer leur dénuement en public. «Dans l’association, on se sent souvent tout-petits par rapport à la situation. Mais quand on fait les livraisons à domicile et qu’on se rend compte comment ça change la vie de ceux qui en bénéficient, on comprend que rien que ça, c’est déjà énorme».

Une centaine de paniers livrés à domiciles aux personnes qui ont des difficultés à se déplacer ou qui ne veulent pas venir au local (Photo: Narivane)
Cette année encore, les livraisons à domicile pour prendre conscience de la réalité (Photo: Narivane)

Et pour faire face au défi logistique, les bénévoles sont une vingtaine à être présents. Certains sont là à chaque distribution d’autres se relayent, et certains viennent même de bien plus loin que Sada.

Une démarche en exemple

«On imaginait pas, il y a 5 ans, que ça pouvait prendre cette ampleur-là. Mais on ne cherche pas non plus à être toujours plus gros. On donne ce qu’on a. Si on reçoit un euro, on donne un euro. Si on reçoit davantage, on donne davantage».

Cette année encore, d’autres initiatives de ce type ont pris exemple sur Narivane. A Combani, des bénévoles ont assuré une distribution. Des échos de démarches similaires à Pamandzi ou Vahibé sont également arrivés aux oreilles des bénévoles de Narivane. Une pause de dignité, dans une actualité qui en a souvent manqué.

RR
www.lejournaldemayotte.com

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