Le vice-président du Département chargé de l’Action sociale et de la Santé a voulu faire ce qui pourrait presque s’apparenter à un bilan de mi-mandat, mais qu’il veut être sa « vision politique ». Une projection vers l’avenir, pour un élu qui ne manque pas d’ambition pour Mayotte, et qui l’a prouvé avec les avancées obtenues dans le domaine du social.
Les moniteurs éducateurs made in Mayotte sont diplômés, première promotion depuis l’implantation locale de l’Institut Régional du Travail Social (IRTS) de La Réunion, « un projet qui me tenait à cœur, de même que celui de la mise en place d’un cursus pour les infirmiers en puériculture à l’IFSI. Et je voudrais avant la fin de mon mandat, avoir pu installer la 1ère année de médecine au Centre universitaire, une façon de boucler la boucle de la formation dans le médico-social, et de pérenniser les emplois sur l’île », indique celui qui est aussi le président du comité de surveillance du Centre Hospitalier. Ce qui l’incite à penser qu’une partie des 120 millions d’euros alloués aux PMI peuvent servir cette cause, « l’enjeu d’une 1ère année de médecine ne peut dépendre d’un problème de budget ».
Pour rester dans l’actualité, la cellule Allo Maltraitance à destination des personnes âgées est inaugurée ce jeudi à Chirongui, avec la mise en place du 08 00000 976, en même temps que celle de l’Unité Territoriale d’Action Sociale (UTAS).
Le service à domicile est un secteur qui monte comme en métropole, et particulièrement adapté à Mayotte : « Cinq associations sont agréées maintenant, et les aides comme l’APA pour les personnes âgées, ou la PCH pour les personnes handicapées, sont des facilitations financières pour l’intervention des travailleurs sociaux à domicile. Si une vieille dame est maltraitée à Mtsamboro par exemple, l’alerte Allo Maltraitance va permettre dans la mesure du possible sa prise en charge à domicile par les travailleurs sociaux, un dispositif plus adapté ici qu’une maison de retraite. De plus, nous allons former des familles d’accueil destinées aux personnes âgées. »
« Pour les familles d’accueil, je dis ‘respect’ ! »
Les familles d’accueil actuelles sont en effet dédiées aux mineurs, 120 sont toujours en formation. On se souvient qu’elles accueillaient beaucoup plus d’enfants qu’autorisé, et sans compétence. Rajoutons qu’en l’absence d’un Centre Educatif Renforcé (le CER, dont un emplacement vient enfin d’être trouvé), elles hébergeaient aussi de jeunes délinquants : « La Protection Judiciaire de la jeunesse ne savait pas où placer ces jeunes à qui il fallait trouver une alternative à la prison, ils étaient envoyés dans des familles d’accueil surbookées qui avaient du mal à gérer des délinquants parfois avérés. Pour des familles non formées, je dis ‘respect !’ » Une manière de répondre aux accusation de maltraitance à l’encontre des enfants de l’île portées il y a un an par le Défenseur des droits Jacques Toubon, « depuis un bureau parisien, c’est facile ! »
L’élu avait donc préféré les conserver et les former, « nous allons recruter de nouvelles familles d’accueil avant la fin de l’année, sur la base des critères en vigueur, notamment la maîtrise du français ».
Ce 11 septembre, sera inaugurée l’AEMO à Mlézi Maore, « cette Action Educative en Milieu Ouvert va permettre de proposer 400 places pour des jeunes en rupture », et l’appel à projet pour les deux Maisons d’enfants à Caractère social (MECS) de 20 places chacune, dont 5 en placement d’urgence, sera clos le 24 septembre, « nous pourrons enfin répondre aux demandes du procureur de placements en urgence des jeunes de 11 à 21 ans, les plus jeunes iront au CER ».
Les PMI couvées par le CHM
Les dispositifs de l’action sociale sont donc peu à peu mis en place sur le territoire, il faut rajouter les Tiers dignes de confiance, et les Lieux de vie et d’accueil (L.V.A.), une structure sociale ou médico-sociale de petite taille assurant un accueil et un accompagnement personnalisé en petit effectif, d’enfants, d’adolescents et d’adultes, en situation familiale, sociale ou psychologique problématique.
« On a eu des sous, on s’en sert ! », résume Issa Abdou en référence aux 61 millions d’euros de compensation de l’Etat pour l’ASE, qui rappelle, « on revient de loin ». Le Département exerce donc enfin sa compétence qu’est le social, à tous les âges de la vie, et le rattrapage a été spectaculaire. Des retards subsistent, et les PMI (Protection Maternelle et Infantile) en font partie. Une convention vient d’ailleurs d’être signée avec le CHM pour améliorer la prise en charge, avec une mutualisation des moyens, et surtout, la mise à disposition de médecins : « Nous avons du mal à recruter avec nos indices de rémunération de la fonction publique territoriale, quand en face l’hospitalière est mieux payée. »
D’autre part, les chantiers des 5 PMI de la mandature sont enfin lancés, « à Bandrélé, Kani Keli, Vahibé, Tsingoni et Acoua ». Un comité de pilotage incluant les services de l’Etat permet une coopération continue, notamment avec l’ARS, « et un apport de compétences. »
Trois ministres attendues en novembre
En matière de solidarité, l’Accueil inconditionnel, à destination aux personnes en situation d’exclusion sociale, est mis en place à Dembéni, « le premier d’une longue série », et la Prévention spécialisée, permettant à des jeunes en voie de marginalisation de rompre avec l’isolement, sera installée le 4 octobre avec l’Etat, sur fonds FAPI (Fonds d’Appui aux politiques), « j’en profite pour encourager les 4 maires qui n’ont pas encore de Centre communal d’action sociale, à s’en doter, il permet une prise en charge de proximité. »
La reprise en main du RSA par l’Etat à Mayotte et en Guyane, fut un combat de longue haleine, « promis par Manuel Valls, mais pas concrétisé », il va permettre au Département de récupérer 17 millions d’euros après le vote de la mesure à la loi de Finances 2018, « nous avons demandé une rétroactivité. »
Outre l’agenda d’inauguration à court terme que nous venons de décliner, l’avenir se conjugue en novembre au temps composé, celui des Rencontres territoriales de la Protection de l’enfance : « Nous accueilleront à Mayotte les représentants des territoires ultramarins, autour d’échanges d’expériences et de pratiques, avec des spécialistes mondialement reconnus. La sortie en Guyane en 2016 m’avait énormément inspiré pour mettre en place la politique sociale. Trois ministres ont été invitées, Agnès Buzyn, pour l’enfance, Nicole Belloubet, pour le volet PJJ et pose de la 1ère pierre du CER, et Annick Girardin pour l’outremer, qui a confirmé sa venue ».
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com