Un Mahorais veut rendre la littérature arabe « accessible au grand public »

Darouèche Hilali Bacar est docteur en littérature. Natif de M'tsapéré, bachelier au lycée Bamana en 2002, il vient de publier sa thèse dans laquelle il décrypte la littérature arabe pour éclairer le monde moderne. De quoi en intéresser plus d'un sur un territoire largement influencé par la "culture arabo musulmane".

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Darouèche Hilali Bacar veut rendre la littérature arabe accessible au plus grand nombre

Au premier regard, la Une blanche et épurée du livre « des autofictions arabes » n’annonce pas le livre le plus accessible qu’un Mahorais ait produit. De fait, la thèse de Darouèche Hilali Bacar, qu’il vient de publier aux éditions PUL dans une version remaniée et vulgarisée « pour la rendre accessible au grand public », reste destinée à un public averti. Les amateurs de littérature, arabe bien sur mais aussi mahoraise et de littérature en général, ainsi que les passionnés d’histoire et de société, y trouveront leur compte. « L’enjeu est de permettre à tout un chacun d’avoir accès à la littérature arabe » explique l’auteur. Dans cet ouvrage, présenté comme une « fenêtre pour le lecteur mahorais sur le monde arabe », il analyse l’usage, assez récent, du style autobiographique par des auteurs arabes, qui est « devenu un enjeu politique et sociétal ». Cet angle serré sert d’accroche à une réalité historique et culturelle plus large, qui n’est pas sans conséquence sur la société contemporaine

Il faut jeter un coup d’œil en arrière pour réaliser le choc cultural qu’ont représenté les campagnes napoléoniennes en orient, notamment en Egypte. Outre les batailles, les pillages et la recherche archéologique avec Champollion, ces campagnes ont apporté au côté arabe une nouvelle source d’inspiration littéraire, quand les auteurs arabes du XIXe ont adopté romans, nouvelles et pièces de théâtre, jusqu’alors apanage des occidentaux. Dans un contexte de montée des nationalismes, puis de guerres d’indépendance dans les années 1960, suivi d’une période de guerres civiles et de dictatures tous azimuts, les auteurs arabes ont compris comment la ressource littéraire pouvait faire pencher la balance. « Par exemple dans les années 1960, la montée des féminismes arabe a été portée par la littérature ». De même « les romans des années 1980 ont eu un impact sur les printemps arabes » analyse le Mahorais. Et tout ça n’est pas une affaire d’élite intellectuelle, puisque la littérature entrant dans la culture populaire, ses idées se diffusent au plus grand nombre. Ainsi « au XIXe siècle, les réformistes étaient des intellectuels. Au XXIe siècle, c’est la population qui demande le changement, et c’est grâce à la littérature. »

Un outil contre l’islamisme

La période actuelle est un nouveau changement dans le monde arable, avec la fin « des régimes tyranniques » qui laisse place à « la lutte contre l’islamisme ». Dans ce contexte, « donner un éclairage sur la société au travers de la littérature, sur les faits religieux et sociologiques, et remettre en cause certaines idées reçues prônées par des politiques ou des prêcheurs » prend tout son sens, explique l’auteur de la thèse.

L’auteur veut ouvrir une fenêtre sur le monde arable

A Mayotte plus spécifiquement, le livre vise deux objectifs. Considérant que « le fondamentalisme, c’est se détacher de la société pour se revendiquer d’une identité culturelle extérieure au territoire », l’auteur veut « replacer Mayotte dans son environnement régional », « désacraliser la langue arable pour dire qu’elle n’est pas que la langue du Coran mais aussi celle de millions d’habitants ». L’auteur veut aussi « dire aux écrivains mahorais qu’il y a des choses à dire au delà de la dichotomie Mayotte-Comores ».
L’ouvrage est proposé aux éditions PUL à 25€, et peut être commandé à la librairie de Passamaïnty et à la Maison des Livres de Mamoudzou.

Y.D.

26 Commentaires

  1. Bravo pour son boulot
    Mais la priorité sur ce territoire en terme de plurilinguisme ce ne serait pas de faire avancer une littérature en shimaore, en kibushi et en Français …
    Je ne remets pas en cause sa thèse ni son travail, bravo à lui
    Mais les enjeux du territoire sont à mon simple avis ailleurs, et je ne parle que pour la réussite scolaire des petits mahorais….

    • Will Lacroix l’arabe fait partie intégrante de la culture mahoraise. Les débats autour de l’arabe et la haine qu’elle entraîne en France métropolitaine n’ont pas leur place à Mayotte, donc merci de ne pas l’importer ici

    • Soof Saurus jepense que vous vous avancez sur un terrain qui n est pas le mien
      Je vous parle de plurilinguisme et d enseignement
      Peut-être 2 thèmes qui vous sont étrangers
      Celui de la problématique de langues de nos territoires aussi d ailleurs
      Je vous laisse alors mélanger les styles 🤷🏼‍♂️

    • VM Sakura je vous rejoins sur ce point
      Mais mon post soulignait le fait que c est sur les 2 langues natales qu il faut réaliser un gros travail, comme le créole réunionnais il y a 30ans, et comme vous le soulignait très bien l arable reste une langue seconde, donc à mon sens importante, mais pas prioritaire aux petits mahorais qui se heurtent déjà à la difficulté de la présence de 3 langues phares sur le territoire et qui s en ressent bcp dans les apprentissages à l école

  2. A tous les haineux et lepénistes qui s’hérissent et sortent les crocs dès qu’ils entendent ou voient le mot « arabe « . L’arabe fait partie intégrante de la culture et la vie mahoraise. Outre le shimaore qui est remplie de mots arabes, la religion pratiquée par plus de 90% des mahorais est basée sur l’arabe, l’histoire, la musique, les vêtements, la cuisine, les danses… tout est imprégné de l’arabe, le renier c’est tourner le dos à une partie de soi-même. Ne soyez pas comme les haineux et ignares de métropole, merci

    • Djoubair Alibaco personne a dit que les mahorais étaient arabe, les gens ils ne lisent même pas l’article, dès qu’ils ont vu « arabe » ils se déchainent. La culture mahoraise est le résultat de mélanges de divers horizons, dont l’arabe, et le renier c’est comme s’amputer d’un membre. Quel honte et quel crime y aurait il à connaitre son passé, son histoire et à lire et apprendre l’arabe ? la langue mahoraise même utilise l’alphabet arabe. Les mahorais ont ils tellement honte d’eux mêmes, qu’ils renient une partie d’eux mêmes ? Les mahorais sont français, mais ne sont pas de culture européenne et judéo-chrétienne. Etre français pour Mayotte, cela veut il donc dire qu’il faut se zemouriser, renier son passé, son histoire, sa culture ?

    • Taantiee Nonoaah c’est comme quand on parle de la France chrétienne alors que les églises sont vides. Même si les mosquées ne sont pas remplies, la majorité des mahorais sont musulmans : ramadhan, prière du vendredi, écoles coraniques, fêtes de l’aid… après tout le monde n’est pas parfait

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