Remettre à l’honneur la brique mahoraise dans la conception d’un nouveau lycée des métiers du bâtiment, voilà une riche idée que le vice-rectorat est en train de concrétiser. « Il s’agit d’un projet d’envergure, puisque le futur lycée professionnel de Longoni devrait accueillir 2.000 élèves. Un investissement de 60 millions d’euros que nous avons voulu investir dans une construction faisant appel aux savoirs locaux, en l’occurrence, la brique en terre mahoraise », nous explique Gilles Halbout, vice-recteur de Mayotte. Et ce ne sera pas un élément d’apparat, comme ce fut le cas pour plusieurs lotissements, « il s’agit du matériau principal du bâtiment ».
Un projet de 60 millions à 600.000 briques, pas mal pour un représentant de l’éducation national qui aime les chiffres ! Mais qui pour les produire à Mayotte ? C’est un sujet pour Vincent Liétar, Art Terre, qui porte le projet depuis 1981 : « Nous pouvons compter sur la capacité des 8 unités de production encore présentes sur l’île. Certaines sont plus ou moins actives, mais à partir de l’émission de la commande, elles pourront livrer 900.000 briques, donc largement le quota. » A son apogée dans les années 90, la production de brique en terre comprimée atteignait 2 millions d’unités avec 17 briqueteries et 32 presses, « et sans automatisation ». Aujourd’hui, de nouvelles alternatives s’offrent au marché.
Certifié ATEx
Une presse a été apportée sur le site du futur lycée à la sortie de Longoni, et, histoire de maitriser la filière de bout en bout, Gilles Halbout se saisit d’une pelle, actionne la presse et produit un joli parallélépipède brun, de sable et d’argile, « la compression et le temps de séchage assurent la solidité, explique Vincent Liétard, une seule brique peut encaisser 24 tonnes ensuite, avec la même résistance que le parpaing. Les centaines de salles de classe que nous avons construites dans ce matériau il y a 30 ans, sont encore en très bon état. »
Une solidité scientifiquement prouvée, puisque le Bloc de Terre Comprimée (BTC) de Mayotte a reçu il y a deux ans une Appréciation Technique d’Expérimentation (ATEx de type A) du Centre scientifique et technique du bâtiment. L’ATEx autorise une construction entièrement en brique de terre compressé jusqu’à un étage, « pour construire plus haut, il faut une armature bois ou métallique ».
Des archis qui mettent de l’huile
A côtés des artisans, les gros du BTP sont sur les rangs pour décrocher les marchés, un équilibre sera donc à trouver dans l’allotissement du marché pour préserver les intérêts de tous.
Outre la maçonnerie, la méthode de conception du futur établissement colle aussi au territoire. Pas uniquement parce qu’une des représentantes des deux cabinets d’architecte en est originaire, mais parce que Camille Abdourazak Augustin, « CoArchitecte » et Lola Paprolki « Encore heureux », travaillent en permanence architecturale : « Nous sommes installées à Longoni, avec un objectif, mettre de l’huile dans le moteur ». Elles sont chargées de surmonter les freins quand ils se présentent, « nous développons la filière locale du BTP, notamment en construisant le Faré du projet, pour que les petits aient leur place dans ce marché. »
Un faré qui commencera par accueillir des fêtes et voulés, pour que chacun s’approprie le projet.
Anne Perzo-Lafond
D’accord pour la brique. Qu’en est-il des fouilles archéologiques sur le site de construction sachant qu’il a abrité une ancienne usine sucrière?!
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