L’extrême pauvreté justifierait-elle cela ?
« Aujourd’hui les Mahorais ou les collectifs des citoyens ne sont plus les seuls à faire directement le lien entre les niveaux extrême de violence juvénile et l’immigration irrégulière. Les plus hautes autorités de l’Etat l’affirment publiquement. Mais est-ce une affirmation présageant un traitement à la hauteur du phénomène ?
Ce qui est certain, c’est que ces propos sont politiquement incorrects et seule la preuve par les actes permettra d’emboîter le pas au verbe, et Dieu sait que des paroles, il y en a eues pour s’alarmer de cette violence insupportable qui attaque à toute heure, à n’importe quel lieu et qui s’en prend à tous publics.
D’aucuns parlent de violences d’appropriation pour motif de subsistance… Certes Mayotte reste le département le plus pauvre de France, et le phénomène des violences à Mayotte d’apparence simpliste s’avère complexe dans la réponse à apporter.
Ceci étant, bien avant l’émancipation de l’action publique au service de nos concitoyens dans les années 70, la société mahoraise a su faire avec « les moyens du bord ». Les gens se satisfaisaient donc de la pauvreté, pourrait-on se dire. Pourquoi pas puisque cette conception des choses ne semble pas contredire l’un des fondements de la société mahoraise que la religion musulmane sans être exclusive, interdit justement de convoiter le bien de son prochain. Ne t’arrivera que ce que Dieu t’a prescrit. Ce qui ne t’a pas été prescrit ne peut pas t’arriver. C’est ça la destinée. De fait, cette acceptation des choses t’interdit donc d’aller violenter l’autre encore moins de porter atteinte à sa dignité ou sa personne pour t’approprier son bien.
« La parentalité fonctionnait »
Et donc s’il y a un canal qui aurait pu conduire les jeunes gens à basculer dans la délinquance ou expliquer cette violence « d’appropriation », c’est bien un déficit d’éducation et d’instruction. Que font les parents d’aujourd’hui ?
En tout cas, en leur temps, les parents mahorais ont fait leurs jobs, la parentalité fonctionnait, ils ont su s’adapter à l’émancipation de l’action publique qui sous-entend que le SIRKAL* doit faire pour ceux qui n’ont pas les moyens. Ils ont fait preuve d’une grande résilience, étaient bien pauvres, et leurs jeunes n’occupaient jamais la une de l’actualité.
Au contraire les pauvres d’aujourd’hui sont plus riches que ceux d’hier. L’INSEE nous le démontre, 77% de taux de pauvreté contre 84% hier. C’est un léger mieux pourrait-on dire. Le territoire de Mayotte tout comme les administrations locales, rendent de grands services aux démunis et pauvres venus d’ailleurs, tout ou presque ici est conduit pour eux, donnant le sentiment parfois qu’on est en train de confisquer aux Mahorais leur développement.
Mais si l’argent faisait le bonheur, ça se saurait ! »
Nabilou Ali Bacar
* Sirkali, les moyens de l’Etat