Les élus mahorais boudent le Quai d’Orsay en raison du statu-quo franco-comorien

Face à un accord-cadre franco-comorien inactivé depuis sa signature et à la dégradation de la situation migratoire, les parlementaires voient rouge, et déclinent une invitation de Jean-Yves Le Drian.

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2014
Quai d'Orsay, Jean-Yves Le Drian, Mayotte, Comores
Arrivée d'un intercepteur chargé de migrants en 2019 (Photo: préfecture de mayotte)

Un an et demi depuis que l’accord-cadre a été cosigné entre l’union des Comores et Paris… Un an et demi fait de détricotage de la part du président comorien auto-rallongé Azali Assoumani, qui a une nouvelle fois en 2020 bloqué pendant plusieurs mois toute reconduite de ses ressortissants à Anjouan.

Comment penser dans ce cas, et qu’après une déclaration telle que lâchée la semaine dernière par le gouverneur d’Anjouan appelant les comoriens à venir « par milliers en kwassa à Mayotte », que des discussions apaisées puissent se tenir avec les élus comoriens. C’est à ce propos que l’on saisit tout l’intérêt d’avoir associé les élus mahorais aux discussions portant sur l’accord cadre qui se tiennent en toute rigueur entre ministres des deux pays. Ce qui ne fut pas le cas au début. Jean-Yves Le Drian aurait-il poussé une saine colère contre cette déclaration du gouverneur Chamsidine ? Difficile de dire ce que la diplomatie nous réserve comme réponse.

Les élus mahorais ont donc décidé de donner de la voix. Conviés le 8 février 2021 par le ministre des Affaires étrangères à une rencontre préparatoire du 2ème comité franco-comorien, les quatre parlementaires, les présidents du Département et des maires ont décidé de ne pas s’y rendre.

Aucune case à cocher pour ce 1er bilan d’étape

Jean-Yves le Drian à Mayotte en 2011, il était alors président de la région Bretagne

Une réaction peu diplomatique qu’ils justifient, tout en disant leur déception d’un Accord-cadre présenté comme un « partenariat renouvelé » entre les deux pays, qui s’est largement dégonflé : « Un volet sécuritaire avec des mesures précises a été établi concernant la lutte contre l’immigration clandestine, la sécurité maritime, la sauvegarde des vies en mer et la gestion rationnelle de la circulation des personnes. Ainsi l’Union des Comores s’était engagée notamment à lutter contre les départs irréguliers d’embarcations vers Mayotte, empêcher le transport illégal de passagers, détruire les ateliers de construction de kwassas destinés à l’immigration clandestine, créer une structure dédiée à la lutte contre les trafiquants d’êtres humains. En contrepartie, une aide française au développement de l’Union des Comores de 150 millions d’euros serait versée sur trois ans.
Or, à ce jour près de deux ans après la signature de cet accord, quel premier bilan d’étape pouvons-nous en tirer ? », écrivent les élus au locataire du Quai d’Orsay dans un courrier que nous nous sommes procuré.

Une déclaration forte, dans laquelle les parlementaires de la majorité prennent tous les risques en se démarquant aussi nettement de la politique du ministre.

Revenant sur le poids toujours plus lourd de l’immigration clandestine comme « frein au développement de notre territoire », et la « flambée de criminalité et de meurtres dont les auteurs et les victimes sont anjouanais », ils expliquent que le contexte n’est pas favorable à leur participation à cette réunion, « ni à celle du comité franco-comorien ».

Le courrier daté du 1er février 2021 doit être cosigné par l’ensemble des grands élus de Mayotte

Ils se disent en revanche prêt à la mise en œuvre du « plan d’action franco-français vers la reconnaissance internationale de la francité de Mayotte », annoncé comme défendant la souveraineté de la France sur Mayotte. Un acte qui permettrait de repositionner le curseur au centre « et de rétablir une certaine forme d’autorité », vis à vis des Comores.

C’est dans cet esprit qu’ils souhaitent la visite de Jean-Yves le Drian à Mayotte, et qu’ils demandent l’envoi de bâtiments de la Marine en renfort de surveillance des côtes.

« Le statu quo n’est plus tenable », avait proféré le président Macron à propos de ce problème franco-comorien. Les élus le lui rappellent.

Anne Perzo-Lafond

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