Liquidation du SMIAM : bilan des négociations sur un foncier « sujet à spéculation »

Communes et conseil départemental s’étaient unis pour le meilleur : construire des écoles et des équipements sportifs. Mais c’est le pire de la gestion d’un EPCI qui les a conduit à la mort déclarée de la structure. Depuis 2014, la présidente essaie de retrouver ses petits, avec un méli-mélo de foncier, qui a donné lieu à des règles efficaces.

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SMIAM, Mayotte
Hidahya Mahafidhou et Chanoor Cassam dressent un point d’étape très avancé

« Où sont passés les millions que nous versons chaque année ? », s’était étonné un maire en 2013, à propos des écoles et des infrastructures sportives que gérait le SMIAM, Syndicat Mixte d’Investissement et d’Aménagement de Mayotte. Un propos qui rappelle notre actualité sur l’eau géré par le SMEAM.

Ce n’est pas que la malédiction plane sur les syndicats intercommunaux ou mixtes, mais c’est encore une fois la gestion qui est mise en cause. Cette année 2013, le préfet Witkowski fait un constat : une seule classe est sortie de terre, malgré les 36 millions d’euros versés chaque année au pot par les collectivités et l’Etat. 80% des écoles ne respectaient pas les règles d’hygiène et de sécurité, et le syndicaliste du SNUipp, Rivomalala Rakotondravelo, décomptait un manque de 600 salles de classe.

C’est la tête d’un syndicat vieux de prés de 35 ans, mais aux caisses vides qu’est élue en 2014 Hidahya Mahafidhou, « je ne m’attendais pas à tout ça ! », nous rapporte-t-elle ce jeudi, 6 ans après. « Tout ça », c’est la dissolution annoncée du SMIAM, par arrêté préfectoral en octobre 2014, avec quelques années après la condamnation de son prédécesseur à de la prison avec sursis pour délit de favoritisme, la nomination par l’Etat de deux liquidateurs, dont aucun des deux n’avait la carrure de « Léon », puisqu’ils pliaient bagages face à la complexité des dossiers.

Car il s’agit de redonner à Paul ce qu’il n’a pas forcément financé, et encore, sur un terrain appartenant à Pierre. Pour exemple, à l’époque, la mairie de Dzaoudzi mettait 2 millions d’euros au pot, elle doit donc récupérer ses billes, en personnels mis à disposition, et en écoles et en infrastructures sportives. Chaque mairie et le conseil départemental sont dans ce cas.

Les communes indemnisées

Après l’inventaire du patrimoine par le cabinet Deltah en 2017, ce sont 564 biens qui sont listés, à partager donc. L’ancien DGS de Chirongui, puis de l’interco du Sud, Chanoor Cassam , se met à disposition « bénévolement », nous explique-t-il, de la présidente. Ils ont divisé le transfert des actifs en trois timing. « La 1ère tranche porte sur les équipements situés sur le foncier public, le plus facile à régulariser, la 2ème plus complexe sur les parcelles à la fois privées et publiques, et la 3ème, sur un déblocage de trésorerie pour indemniser les collectivités qui seraient lésées ».

Depuis 2018, les collectivités ne contribuent plus financièrement au SMIAM, « le capital suffisait largement à rembourser les 7 millions d’euros de dettes », indique Chanoor Cassam.

A ce jour, 41% du patrimoine est transféré, 30% d’écoles et 11 d’équipements sportifs. « Il y a beaucoup de spéculation foncière à Mayotte, nous devons donc raisonner bien par bien ». Avec une ligne de conduite facilitatrice, la territorialisation : « Les difficultés majeures portent sur la régularisation lorsqu’un établissement public est construit sur un terrain privé. Nous transférons donc l’ensemble systématiquement aux communes, qui finaliseront la régularisation. Chaque commune récupère la propriété de l’ensemble des équipements sis sur son territoire, qu’ils soient scolaires ou sportifs. Avec donc des compensations versées au besoin. » La trésorerie de 8,5 millions d’euros le leur permet.

La SIM contre les écoles

Le siège du SMIAM dans la balance

Exemple de complexité, l’école de Chiconi, au carrefour en face de la pharmacie : « Elle est dans l’emprise territoriale de Sada. La territorialisation voudrait que cette dernière la récupère, or, il n’y a que des élèves de Chiconi ». Ce retard de régularisation ne nuit pas aux travaux à effectuer sur les établissements indique Chanoor Cassam.

La présidente insiste sur le rôle de facilitateur de l’Etat, « il nous a vraiment accompagné ». Quant au conseil départemental qui a cofinancé, il a donné son accord pour léguer les écoles aux communes, mais pas sans contrepartie, « celle de récupérer le siège du SMIAM (en face de la mairie de Mamoudzou, ndlr) et les actions du SMIAM dans la Société Immobilière de Mayotte ». On se souvient que le conseil départemental n’avait pas suivi l’augmentation de capital de la SIM qui faisait de la CDC Habitat son actionnaire largement majoritaire.

Cet accord sur le siège du SMIAM et les actions avait été obtenu fin 2020, « le maire de Mamoudzou a cédé »… mais depuis, de nouveaux maires ont été appelés à régner. Et cette fin de semaine, un nouveau président succèdera à Hidahya Mahafidhou. Il était donc indispensable qu’ils aient un bilan à se mettre sous la dent, illustrateur de l’énergie qui a été déployée uniquement pour tenter de solder la structure.

La liquidation du SMIAM n’est donc pas encore terminée, « mais en métropole aussi c’est long », explique le « DGS bénévole » qui entrevoit la fin, « d’ici un à quatre ans ». En l’état actuelle des acceptations.

Anne Perzo-Lafond

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