Agriculture : la CCSud veut prendre le zébu par les cornes

Après la signature des premiers baux agricoles vendredi dernier, les exploitants doivent investir le site de Mro Mohou (Bandrélé) en septembre. Sur place, les 11 agriculteurs sélectionnés bénéficieront d’équipements communs et d’un loyer modéré. De quoi aider à structurer la filière, d’autant que quatre autres pôles de ce type doivent entrer en exploitation sur le territoire de l’interco.

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Le dynamique enclenchée doit permettre à l'agriculture de relever la tête.

« Les agriculteurs de Bandrélé ne vous décevront pas ». C’est avec une certaine émotion qu’Abdou Silahi s’approche du maire de la commune et président de l’interco du Sud pour signer avec lui son bail agricole. Ce jour, sept autres agriculteurs ont procédé à ce même geste de la main, affichant un même sourire au visage. En septembre, ils devraient être 11 à investir le plateau de Mro Mohou, transformé en pôle agricole après l’achat de 13 hectares de terrain par la municipalité (la surface totale du site est de 19 hectares) et un aménagement opéré par l’Epfam (l’établissement public foncier de Mayotte).

Sélectionnés à travers un appel à projet de la CCSud, ils bénéficieront – outre la force du collectif – d’équipements communs tels que des bâtiments de stockage, de bureaux ou encore d’une chambre froide. Et bien sûr, d’une irrigation, d’une électrification et d’un accès viabilisé que nombre d’agriculteurs envient encore sur l’île.

Les premiers agriculteurs ont signé leurs baux vendredi dernier.

« C’est un peu une révolution pour le secteur agricole », se réjouit Clément Rollet, lui aussi signataire des premiers baux de Mro Mohou. Il faut dire que pour le pépiniériste, cette signature marque la fin d’un long chemin et le début d’une nouvelle vie. « Ça faisait quatre ans que j’attendais de trouver du foncier pour m’installer », explique celui qui peinait à faire vivre son activité au lycée de Coconi à travers un bail précaire. « C’était la survie », lâche-t-il. Comme lui, nombre de jeunes agriculteurs peinent à s’installer du fait d’un foncier trop onéreux.

Lever les freins à l’installation

«C’est très problématique car nous avons ainsi beaucoup de mal à renouveler les générations d’agriculteurs, on peine à croire que la relève pourrait être assurer alors même qu’il faudrait redoubler d’efforts pour espérer tendre vers la souveraineté alimentaire », commente Clément Rollet pour qui « l’agriculture est en partie ce pour quoi Mayotte est connue, il faut valoriser ses produits et ça pourrait être un formidable levier pour l’emploi, les formations et l’économie en général ».

Problème, « comment voulez-vous être rentable aujourd’hui quand des terrains sont à 50 euros le mètre carré ? C’est impossible. Alors les propriétaires construisent, même sur des terrains agricoles bien que cette forme de spéculation sur les terres soit interdite », dénonce celui qui est également membre de Jeunes agriculteurs, syndicat fortement mobilisé sur la question.

D’où l’intérêt d’une intervention de l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte qui permet de réguler le prix de location à Mro Mohou. Un prix raisonnable donc, propice à l’installation des agriculteurs auquel s’ajoute les infrastructures et les équipements communs. « En gros on a là tout ce qui permet de lever les freins », résume avec satisfaction le pépiniériste.

Des agriculteurs engagés

Un cahier des charges précis impose aux agriculteurs des méthodes vertueuses.

Mais l’offre n’est pas sans contrepartie. Outre le loyer modéré, les agriculteurs déjà sélectionnés par un comité pour la qualité de leurs projets devront répondre à un cahier des charges précis. Le caractère durable de leur activité, l’engagement à éviter l’érosion des sols seront, entre autres, vérifiés tous les trois ans. Par leur signature, les agriculteurs s’engagent également à maintenir l’harmonie qui a prévalu à la délimitation et à l’attribution des parcelles en fonction de leur nature et des fonctions qu’elles doivent accueillir. « Exemple tout bête, on utilisera le fumier des bovins pour le maraîchage », illustre Clément Rollet. Arbres fruitiers, baies, poulets de chair, zébus, ou encore poivre et miel, « l’objectif est que toutes les productions puissent à un moment ou un autre entrer en interaction avec les autres ».

Bien plus que des terres c’est donc un « projet phare, audacieux, qui nous motive à réunir nos forces et nos savoirs pour nous ancrer entre tradition et innovation », qui voit le jour selon les mots d’Abdou Silahi, qui élèvera sur place des poules pondeuses.

Autant d’engagement et de bonnes pratiques gages de qualité pour des produits que Bandrélé aimerait voir emplir les étals de ses deux nouveaux marchés. Et constituer ainsi un circuit complet de la terre à l’assiette. Au delà, c’est à l’échelle de l’interco que devraient se multiplier les pôles agricoles de ce type, sur les plateaux de Chirongui Malamani, Karoni, Kani-Kéli et Mronabéja. De quoi motiver les jeunes pousses !

G.M

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