La semaine fut agitée. Cauchemardesque même pour les usagers de la route qui, après avoir été bloqués par des barrages érigés par des scolaires en matinée ce mercredi, se retrouvaient pris sous des feux nourris de pierres lancées par des bandes cagoulées. Celles-ci ont même pris possession du bitume puisque des tentatives de blocages, notamment à Combani et Trévani, ont encore été perpétrées jusqu’à ce vendredi matin, déjouées par les forces de l’ordre.
Un chaos sur la route qui était prévisible. Les salariés de la société Matis avaient en effet déposé leur préavis de grève le 18 juillet avec comme mot d’ordre la sécurité de l’emploi lors de la passation du nouveau marché en 2021. Une question reste en suspens : lors de la fin d’un marché public, le personnel n’est-il pas assuré d’être repris chez celui qui en a compétence, le conseil départemental ?
En tout cas, il semble qu’aucune négociation n’ait été menée alors. Le conseil départemental qui endosse la compétence des transports au titre de la Région, connaissait une scission au sein des élus de la majorité sur ce sujet. La rentrée arrivant, ce fut le clash que l’on connaît. Avec comme toile de fond, la direction de Matis qui déposait un recours pour casser la rédaction du nouveau marché, déboutée par le tribunal administratif. Matis qui était à la fois gestionnaire et exploitant, y perd, puisque, dans ce nouveau marché à 7 lots, elle devra logiquement choisir entre l’un et l’autre. On peut donc dire que l’ensemble de l’entreprise, des conducteurs à la direction, était vent debout contre cette évolution.
Le préfet part au front
Egalement en grève, les 5 transporteurs d’Ouvoimoja transports, qui contestent toujours l’utilisation d’un 3ème avenant, signé sous la forme d’une convention de gestion. IL faut espérer de ce côté aussi un retour à la raison, avec la possibilité pour eux désormais de décrocher un lot à part entière dans le, tardif, mais futur marché.
Des négociations ont alors été menées, réunissant élus du Département et salariés de Matis, la grève de ces derniers paralysant une partie du transport des 24.000 élèves. Le chiffre de 10% de perturbations était avancé, mais in fine, impossible pour les sociétés non grévistes de ramasser les hordes d’élèves qui se massaient sur les arrêts de bus. Provoquant leur réaction de colère qu’ils choisirent de traduire en barrages.
La demande des salariés portant sur l’application des conventions collectives nationales qui ne s’appliquaient pas à Mayotte, le préfet Jean-François Colombet et la directrice de la Dieccte entraient dans la danse, et négociaient avec le ministère du Travail une dérogation. Qu’ils obtenaient après des échanges acharnés de 48h. En retour, et face à la valse hésitation des représentants syndicaux, le préfet partait même faire le VRP de luxe auprès de la « base » à Longoni, qui acceptait cette avancée. Un quitte ou double courageux qui a payé.
Etendu à l’ensemble du transport scolaire
Ce vendredi, à la Dieccte, se déroulait une première : un accord de branche concernant le transport scolaire était signé entre les partenaires sociaux, le Medef, la CFE-CGC, la CFDT et FO. Aussitôt, les syndicats ont demandé la même déclinaison pour toutes les branches, en pointant des freins jusqu’alors du côté du Medef.
Prenant leur contre-pied, le syndicat des patrons évoque la négociation et la signature d’un accord professionnel relatif à la garantie de l’emploi et à la poursuite des relations de travail en cas de changement de prestataire dans le transport scolaire à Mayotte, comme « une avancée extraordinaire pour le territoire ».
L’accord assure le maintien des acquis sociaux, mais aussi, « il sera également étendu à l’ensemble des entreprises de transport scolaire de Mayotte, dès lors où il sera question de changement de prestataire. Cette extension constitue une avancée sociale pour la profession », commente Carla Baltus, présidente du Medef, et à la tête de son entreprise éponyme de transport. Il ne s’agit pas d’un copier-coller de la convention collective nationale, mais d’une déclinaison partielle.
Depuis ce samedi, les offres pour la gestion du nouveau marché de 2021 sont closes.
Anne Perzo-Lafond