Le mois d’avril est traditionnellement celui du pic des cas de leptospirose à Mayotte. Avec la fin de la saison des pluies, les sols dégorgent des substances qu’ils ont accumulé tout au long de l’année et en particulier les urines d’animaux, essentiellement celles des zébus et des rats. Lorsque ces animaux sont concernés par la maladie, ils la disséminent sur le sol. La pluie vient ensuite propager les zones infectées. L’homme peut être contaminé lorsqu’une plaie, même minime, entre en contact avec ces eaux et cette terre souillées.
Selon les informations du Journal de Mayotte, c’est ce qui est arrivé à au moins trois coureurs du trail des makis. Organisée au début du mois d’avril, en pleine période de pluies intenses, la course a amené ses athlètes à traverser beaucoup de zones boueuses, où ils ont parfois pataugé et dans lesquelles ils peuvent même être tombés. «C’est un phénomène très courant. Aux Antilles, régulièrement, des cas de traileurs contaminés par la leptospirose sont signalés après des courses», nous explique un spécialiste de la maladie.
A ces trois premiers cas repérés pourraient donc s’en rajouter d’autres. Pour ces coureurs et d’autres qui seraient concernés, rien de dramatique à condition d’aller consulter un médecin dès l’apparition des premiers symptômes*, en précisant qu’ils ont couru dans la boue.
20 cas par semaine, une suspicion de décès
Car il faut prendre la leptospirose très au sérieux. Elle peut en effet s’aggraver après quelques jours. Si elle n’est pas traitée à temps par des antibiotiques, elle peut être mortelle. Depuis le début de l’année, le JDM est en mesure d’affirmer que 7 personnes ont été hospitalisés en réanimation au CHM pour cette maladie. Actuellement, une enquête est même menée sur une suspicion de décès liée à la maladie. Les résultats devraient être connus en fin de semaine.
Si le nombre de cas graves est important, c’est que Mayotte n’a jamais enregistré autant de malades. Actuellement, une vingtaine de cas sont diagnostiqués chaque semaine et, toujours selon nos informations, le cap des 150 malades depuis le début de l’année devrait être dépassé dans les jours qui viennent. Pour mémoire, en 2015, notre département en avait enregistré 90 sur l’ensemble de l’année.
Des causes connues
La saison des pluies particulièrement marquée de ces derniers mois n’est évidemment pas étrangère à cette recrudescence mais d’autres causes, sociales et environnementales, jouent aussi sur le phénomène: la prolifération des rats autour des déchets en est une, l’augmentation d’une population précaire, plus encline à laisser les enfants pieds nus, peut également favoriser à la hausse le nombre de contaminations.
Concernant les coureurs du trail des makis, des investigations sont en cours à pour recouper les fichiers des coureurs avec ceux des malades déjà connus et ainsi établir un «bilan épidémiologique» de la course. A défaut de pouvoir éviter les flaques et la boue, les coureurs des prochaines épreuves, en particulier ceux du Run des tortues, prévu ce weekend, sont invités à être attentifs à leur état de santé dans les semaines qui viennent.
RR
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*Pour tout savoir sur la leptospirose, voici les données fournies par l’Agence régionale de santé :
La maladie
La leptospirose est une maladie transmise par des bactéries provenant des urines de mammifères infectés, et notamment de rats.
Les hommes sont contaminés au contact de l’eau ou de surfaces humides souillées par les urines de ces animaux (boues, flaques d’eau, rivières, etc.). La bactérie pénètre dans l’organisme en cas de plaies corporelles, même minimes.
Les symptômes
Après quelques jours d’incubation (entre 4 jours et 2 semaines), la leptospirose se manifeste par les symptômes suivants :
-Une fièvre élevée (souvent > 38,5 °C)
-des douleurs musculaires et articulaires, des signes digestifs
-des maux de tête
Dès l’apparition de ces signes, il faut consulter un médecin pour bénéficier d’un traitement antibiotique.
Comment éviter la leptospirose ?
Appliquer des mesures de protection individuelle :
– désinfecter et protéger ses plaies en utilisant des pansements imperméables.
– éviter de se baigner en eau douce ou de laver son linge en rivière lorsqu’on est porteur de plaies, même minimes, ou les protéger en utilisant des pansements imperméables.
– dans la mesure du possible, se protéger par le port de bottes et de gants lors d’une activité à risque (agriculture, élevage, travail dans les champs, jardinage, etc.).
– éviter de marcher pieds nus, ou en chaussures ouvertes, sur des sols boueux ou en eau douce, surtout après de fortes pluies.
Il faut également lutter contre la prolifération des rongeurs :
– entretenir régulièrement l’environnement de son domicile, en déposant ses poubelles dans des bacs de collecte et en éliminant les encombrants.
– éliminer tous les restes de nourriture (y compris l’alimentation des animaux) qui pourraient servir de nourriture aux rats.