A chaque île son problème de drogue. Maurice et les Seychelles sont confrontées à l’héroïne et à la cocaïne. A La Réunion, il est beaucoup question du détournement de l’usage de médicaments. Ainsi, un traitement de l’épilepsie est utilisé à des fins de «soumission chimique», administré à l’insu de la personne pour abuser d’elle d’une façon ou d’une autre.
Tout aussi marquant, l’usage détourné de l’Artane. Considéré comme «l’ecstasy du pauvre», il produit chez ceux qui le consomme en dehors d’une prescription médicale de l’euphorie et un sentiment de toute-puissance, accompagnés parfois d’une désinhibition favorisant le passage à l’acte.
Quant à Mayotte, elle fait face au «chimique», là encore avec des effets parfois de plénitude mais aussi de grandes violences, avec des passages à l’acte parfois très spectaculaires.
Si ces drogues sont totalement différentes et consommées sur des îles aux problématiques distinctes et parfois très éloignées, les spécialistes de ces questions se sont retrouvés à La Réunion pour confronter leurs expériences. C’était le souhait de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), pour un événement piloté par la préfecture de La Réunion avec l’ARS.
Apprendre des voisins
«C’est la première fois qu’a lieu cet événement à la Réunion. Il s’agit de partager les expériences et de tisser des liens entre les territoires. Cela permet de voir comment cela fonctionne chez nos voisins», indique Rémy Darroux, sous-préfet à la cohésion sociale et la jeunesse et chef de projet local Mildeca.
C’est ainsi que ce sont retrouvés le Dr Hemery, médecin à la Kaz Oté à la Réunion, le Dr Morel, médecin addictologue aux Seychelles et Mme Rabot-Honore de l’association CUT à Maurice. Le professeur Marc Auriacombe, chef du service d’addictologie et de psychiatrie au CHU de Bordeaux, est également intervenu lors de cette journée d’échanges. Il est actuellement à La Réunion dans le cadre du diplôme universitaire d’addictologie du CHU de la Réunion.
Améliorer les savoir, notamment sur le chimique
Pour le directeur général adjoint de l’Agence régionale de santé océan Indien, ce besoin de liens entre les professionnels est essentiel. Nicolas Durand insiste d’ailleurs sur les échanges avec Mayotte: «La connaissance sur le phénomène de l’addiction n’est pas encore développée. Le but est d’améliorer les savoirs. Notamment sur le chimique.» Ce poison est bien connu par le Dr Ali Mohamed Youssouf qui était également présent.
Le médecin, au service addictologie du CHM, consulte des patients touchés par les effets de cette nouvelle drogue. «Ce produit n’est pas juridiquement considéré comme un stupéfiant. C’est du cannabis de synthèse. Il déclenche parfois un grand degré de violence. Ses effets provoquent un bad trip, des hallucinations et une grande dépendance. Des consommateurs voient leur vie défiler, subissent des bouffées délirantes et des épisodes de folie», a expliqué le praticien à ses confrères.
Un observatoire de l’ARS
Des outils sont déjà disponibles pour favoriser la circulation des informations et les échanges de pratiques en matière de santé, sur les drogues et les moyens d’y faire face. C’est le cas, par exemple, de la Plateforme d’échanges et d’information drogues et dépendances (Peidd) dont l’action a été étendu à l’Outre-mer, incluant de ce fait la Guyane et Mayotte, deux départements particulièrement touchés.
Mais pour suivre au plus près l’évolution de la situation sanitaire sur le front des addictions, l’Agence régionale de santé muscle ses dispositifs. «L’ARS va mettre en place un observatoire pour les problèmes d’usage de drogue afin d’apporter des solutions. Cela nous permettra d’adapter nos messages en fonction de nos publics», indique le docteur Mohamed Ali Youssouf.
RR, le JDM
Avec le JIR.
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