Pour accoucher, les femmes souhaitent allier rituels et modernité

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La doctorante Zakia Ahmed
Zakia Ahmed présentait une feuille de Mhono Boina, utilisée pour envelopper le placenta
Zakia Ahmed présentait une feuille de Mhono Boina, utilisée pour envelopper le placenta

La doctorante en Anthropologie à l’INALCO, Zakia Ahmed était plus à l’aise lors des échanges ultérieurs avec le public que lors du déroulé de son exposé. Il portait sur son étude depuis 2011 des départs de femmes mahoraises et comoriennes pour aller accoucher à La Réunion. « Elles ont entre 20 et 30 ans, ont déjà 3 à 5 enfants, et partent seules, soit en raison de difficultés conjugales, soit avec la belle famille, et ont un niveau scolaire bas ou inexistant », nous apprenait la chercheuse.

Et elles reviendraient ensuite à Mayotte. « Elles sont en quête de soins de médecine occidentale à La Réunion. Et en quête de sécurité des soins » Les cadres de santé, venues tout exprès dans la salle de cinéma Alpa Joe pour en savoir un peu plus sur les pratiques locales, auront été douchés à froid. « Ça pose un problème de la mauvaise représentation des conditions d’accouchement ici. J’ai accouché à Mayotte, et je recommencerai sans problème, il faut casser cette image négative », lançait une jeune femme.

Plus que la sécurité, il s’avérait au cours des échanges que c’est le confort qui était recherché par ces partantes, enceintes, à La Réunion.

Chouchoutée pendant 40 jours

Plusieurs réactions dans la salle
Plusieurs réactions dans la salle

La démarche ne devrait pas jouer en faveur de la pérennité des pratiques ancestrales, mais les herbes et huiles de massage suivent dans les glacières vers La Réunion, assure Zakia Ahmed. Il aurait été intéressant de connaître ces rituels mois par mois. On apprenait en particulier que les massages sont pratiqués sur les femmes du 3ème au 4ème mois de grossesse par les aînées, « pour relaxer le dos et les lombaires », et avant l’accouchement, elles doivent avaler un bol de lait sucré et un jus de feuilles d’orovéni.

Même spécificité pour le placenta qui est systématiquement enterré, « il est considéré comme le petit frère du bébé, et est enveloppé auparavant dans une feuille de Mhono Moina, appelé aussi ‘main de l’enfant’ ».

Lorsqu’elle a accouché, la femme est recluse pendant 40 jours avec son bébé, « on allume un feu sous son lit et celui du bébé, car on considère qu’ils ont perdu de l’énergie, donc de la chaleur ». Sauf pour les Ranguinalou, « des descendantes de malgaches, qui ont des interdits comme tout ce qui est chaud ».

Prières, massages, boissons chaudes… « Les femmes aiment enfanter ici, car c’est une période où l’on prend soin d’elles », conclut Zakia Ahmed.

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

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