Tribune Mouhoutar Salim : « L’année qui se termine a été malgré tout constructive, très fertile en projets »

En prenant comme exemple les gestes utiles contre la dengue et le Covid-19, le conférencier Mouhoutar Salim nous apprend sur nous-mêmes et sur la capacité de la population à prendre sa destinée en main. A ce titre la sombre année 2020 révèle des sursauts de réaction qui peuvent porter leurs fruits en 2021.

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ARS, rectorat, Mayotte, Covid
Mouhoutar Salim tire un bilan utile de l'année 2020

L’ESPOIR MALGRE TOUT

Avec ces fêtes de fin d’année et cette nouvelle année qui se profile, je voudrais tout d’abord, présenter mes meilleurs vœux de bonheur personnel et familial de santé et de réussite à tous les Mahorais et sans aucune distinction partisane. Que tous passent de bonnes fêtes de fin d’année et trouvent en 2021, la concrétisation de leurs plus belles espérances. Que notre île connaisse en cette nouvelle année la concorde, l’harmonie sociale, la santé et le progrès collectif qu’elle mérite.

Mais les vœux, s’ils sont rituels, ne sont pas une simple incantation. On ne peut s’en remettre à la fatalité pour les voir se réaliser ou pas. Il dépend de chacun de nous que l’année 2021 soit bonne ou non puisque nous pouvons, par nos actions personnelles et nos choix en orienter le cours. Ce pouvoir, nous l’exercerons notamment par nos actions et nos choix. Cette possibilité, bien réelle, d’agir sera mise à l’épreuve, d’une part, dès l’arrivée imminente de la prochaine saison des pluies, favorable au développement des moustiques, et qui impose à tous, le renforcement de la vigilance dans la lutte contre la dengue. Dans ce contexte, les actions de nettoyage, lutte contre les gîtes larvaires et de prévention contre les piqures des moustiques vecteurs des maladies telles que la dengue, le chikungunya et le paludisme sont indispensables. Et d’autre part, de notre capacité à rester vigilants et de continuer de respecter les mesures barrières notamment : le lavage des mains, le port de masque et la distanciation physique. Il s’agit ici de prévenir le coronavirus SARS-Cov-2.

Pour mieux appréhender les situations auxquelles nous serons confrontées, il est d’usage dans le contexte mahorais de dresser le bilan de l’année écoulée.

En mai, la population s’interrogeait sur son devenir. Julien Balicchi présentait la modélisation épidémiologique de l’ARS

Une année difficile dans tous les domaines de la vie quotidienne

Tous les Mahorais ont pu vérifier que 2020 a été marquée par un climat de tensions sociales sous la forme de grèves à répétition dans les secteurs publics (SDIS) et privés et ses conséquences parfois dramatiques (suicide d’un employé de la grande distribution), par des actes de déviance juvénile (caillassage de la population , des forces de l’ordre, des services d’assistance – SDIS, CHM KAHANI , CHM DZOUMOGNE – des moyens de transports individuels et collectifs – bus scolaires et barges- ), par des violences allant parfois jusqu’aux homicides, notamment à CHICONI, à MTSAGAMOUJI et à TREVANI, qui ont eu notamment un écho national1, par de nombreuses arrivées des (kwassa kwassa) avec tous les dangers et les « drames de l’immigration clandestine en terre française et enfin par la recrudescence des affrontements inter-villages entre jeunes des villages de MIRERENI et COMBANI, de OUANGANI et de BARAKANI, de TREVANI et de KOUNGOU, de PASSAMAINTY et de DOUJANI.

A ce lourd climat social, s’ajoutent, d’une part, deux épidémies qui ont sévi simultanément sur l’île : une épidémie de dengue, avec au moins 4305 cas enregistré dont 7 décès, associée à celle du coronavirus SARS-Cov-2 dès le 14 mars 2020. Depuis cette date, ont été enregistrés à Mayotte, 5.890 cas de Covid 19 au 28 décembre dont 55 décès.

Cette maladie a suscité autant de peur de sa contamination que de frayeur devant la mort dont elle est porteuse. Du fait des mesures de confinement, elle a été source de crise alimentaire et vectrice de nombreuses ruptures dans les rapports sociaux, mais aussi dans les procédures de gestion funéraire et des pratiques cultuelles (prières, pèlerinage, fêtes religieuses…).

En septembre, des jeunes brûlaient une quinzaine de voitures à Combani, et endommageaient plusieurs installations (Photo IRM)

Par ailleurs, une crise de pénurie d’eau potable affecte toute la population de Mayotte. Pour faire face à cette situation et dans l’attente de l’arrivée de la saison des pluies, des tours de distribution d’eau sont organisés.
Il est à noter également, des épisodes de grandes marées, avec des amplitudes pouvant atteindre 4,44 m, le 18 octobre à 4h44 qui ont perturbé le fonctionnement de l’île. Des mesures d’adaptation des horaires des barges ont été prises. Aucun dégât n’a été observé, cependant la circulation TSARARANO –MAMOUDZOU a été déviée vers COMBANI.
Et pendant ce temps, la terre de Mayotte continue de trembler très régulièrement. Ces essaims de séismes, sont générateurs de stress et d’anxiété. Le record d’amplitude à 5, 8 sur l’échelle de Richter, a été enregistré pour la deuxième fois le 21 mars 2020, depuis le début de la crise sismique le 10 mai 2018.

Une année fertile en projets et quelques regrets…

Les Assises de la sécurité initiées par le maire de Mamoudzou en novembre

Malgré ce descriptif un peu sombre, l’année qui se termine a également été une année constructive, très fertile en projets, révélateurs d’une activité intense pour le progrès de Mayotte. On a assisté, à la mise en place d’une ARS MAYOTTE et d’un Rectorat de plein exercice, à l’inauguration des PMI de ACOUA et de COMBANI, après celles de POROANI et de MTSAMOUDOU, en 2018, répondant ainsi au plan de reconstruction de 10 centres de PMI, signé par la Ministre de l’Outre-Mer et le Président du Conseil départemental le 31 août 2017, à la réhabilitation du quai n°1 de LONGONI en perspective du projet gazier de Mozambique, à la conférences des Présidents des RUP, présidée pour la première fois par le Président du Conseil Départemental de MAYOTTE, aux premières assises de la sécurité et de la citoyenneté, initiées par la collectivité de MAMOUDZOU , suivie de la préfiguration d’un observatoire des violences sous l’égide du Rectorat, de l’ARS et du Parquet, à l’élaboration du schéma départemental des services aux familles, à la relance du projet de contournement de MAMOUDZOU et de celui d’une piste longue susceptible d’accueillir les avions long-courrier.

En effet, pour les Mahorais, seule une piste longue peut – comme on l’a vu dans toutes les îles de la région – créer une concurrence dans la desserte et donc générer, la baisse des tarifs, un vrai transport social et un véritable développement du tourisme.

Et la préfiguration de l’Observatoire des violences le même mois

Malgré le manque criant d’équipements sportifs à Mayotte, le football club de MTSAPERE devient la première équipe mahoraise à se qualifier pour les 32ème de finale de la coupe de France.

Enfin, alors que les Mahorais sont toujours heureux et honorés de recevoir ses invités de marque, les visites ministérielles – tant attendues – n’ont guère été fréquentes dans notre île en cette année 2020, sans doute à cause de la situation sanitaire, même si le Secrétaire d’Etat chargé de l’enfance et de la famille était à Mayotte en octobre dernier. Ce bilan de l’année 2020 ne doit pas nous laisser au repos ou à des rêves chimériques. La dure réalité de la situation économique et sociale de Mayotte en raison de la Covid 19 ne nous l’autorise en rien.

Salim MOUHOUTAR
Auteur Conférencier

1- https://www.lefigaro.fr/flash-actu/mayotte-nouvelles-violences-apres-l-agression-mortelle-d-un-mediateur-20201219

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